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Article publié en 2016.
Auteur : François DROUET.

Photographies : voir indications.
Tous droits réservés.

 

 

Butia odorata vs Butia capitata

 

(précisions et commentaires)

 

 

 

Butia capitata (Mart.) Becc. est, selon moi, le palmier acclimatable le plus méritant pour sa résistance au froid et pour la qualité de son fruit comestible. Je le pratique depuis plus de quarante ans sur le littoral méditerranéen du Var et des Alpes-Maritimes. J'ai appris à le reconnaître d'un seul coup d'oeil, à tester sa fructification pour sélectionner les meilleurs fruits, variables d'un spécimen à l'autre, ainsi qu'à connaître les rares endroits de la côte où l'on trouve la remarquable variété pulposa, au fruit énorme et pulpeux. Mais, depuis quelques temps, je ne puis pratiquement plus prononcer son nom...

En effet, ces dernières années j'ai lu partout qu'il a changé de nom, et je constate que, désormais, la quasi-totalité des scientifiques, des palmophiles, des pépinières, et des revendeurs semblent avoir banni son nom de leur vocabulaire. Ils utilisent l'appellation Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick. On trouve la fiche de Butia odorata dans la base de données taxonomique The Plant List (gérée par les Royal Botanic Gardens de Kew et le Missouri Botanical Garden et à laquelle collaborent un certain nombre d'autres institutions). Elle renvoie aux détails dans la base taxonomique IPNI, où est indiqué le basionyme Cocos odorata Barb. Rodr. (base gérée par les institutions Royal Botanic Gardens de Kew, Harvard University Herbaria et Australian National Herbarium, Canberra). Mais le nom d'espèce Butia capitata (Mart.) Becc. n'a pas été supprimé ; il désigne toujours un palmier. On trouve également sa fiche dans la base de données taxonomique The Plant List. La fiche renvoie aux détails dans la base IPNI, où est indiqué le basionyme Cocos capitata Mart.

Pourquoi ce changement de nom après un siècle d'utilisation de l'ancien nom sans problèmes d'identification ? De quoi parle-t-on désormais avec le nom qui a été conservé ? Comment reconnaître la nouvelle espèce ? Je pense que la situation engendrée par le nouveau nom d'espèce mérite précisions et commentaires. Je m'en explique ci-après, en donnant quelques points de réflexion pour essayer d'y voir plus clair, mais aussi de comprendre à quel niveau ce n'est plus clair. Selon le plan suivant : création du nom d'espèce Butia odorata, historique de la validation du nom Butia odorata, justification de la création de Butia odorata, conservation du nom d'espèce Butia capitata, interrogations sur l'intérêt de la création de Butia odorata, reconnaître Butia odorata.

 

CRÉATION DU NOM D' ESPÈCE BUTIA ODORATA

 

QUI A CRÉÉ LE NOM D'ESPÈCE BUTIA ODORATA ?

L’appellation Butia odorata a été créée par le botaniste Larry Ronald Noblick dans un article intitulé "Validation of the name Butia odorata", publié dans la revue Palms, vol. 55 (1), 2011, pages 48-49. Larry Noblick est un botaniste spécialiste des palmiers d'Amérique du Sud de réputation internationale. Docteur ès siences, il exerce ses activités depuis 1994 au Montgomery Botanical Center, à Miami, en Floride. Il est actuellement biologiste spécialiste des palmiers, après avoir été le directeur des collections de palmiers. Il a écrit, ou co-écrit, de nombreux articles scientifiques, et collaboré à un certain nombre d'ouvrages. Botaniste-explorateur, il a effectué de très nombreux séjours dans 18 pays qui abritent des palmiers de façon endémique, en particulier le Brésil.
 

Larry Ronald Noblick, créateur du nom Butia odorata   Larry Ronald Noblick, créateur du nom Butia odorata

Larry Ronald Noblick, créateur du nom Butia odorata.
(crédit :
Montgomery Botanical Center).

 

COMMENT A ÉTÉ CRÉÉ CE NOM ?

Au début de l'article précité, Larry Noblick indique : Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, comb. nov.  Basionym : Cocos odorata Barb. Rodr., Pl. Jard. Rio de Janeiro 1: 11, t. 4a, 5c. 1891. Ainsi, Butia odorata est une nouvelle combinaison (combinatio nova) reprenant le nom d'espèce du basionyme Cocos odorata créé en 1891 par João Barbosa Rodriguez (1842-1909), botaniste brésilien, alors directeur du jardin botanique de Rio de Janeiro, dans l'ouvrage Plantas novas cultivadas no Jardim botanico do Rio de Janeiro, vol. 1, pp. 11-14, planches 4a et 5c.
 

João Barbosa Rodriguez (1842-1909), créateur du nom Cocos odorata

João Barbosa Rodriguez (1842-1909), créateur du nom Cocos odorata.
(Extrait de Sertum Palmarum Brasiliensium, de João Barbosa Rodriguez).

 

HISTORIQUE DE LA VALIDATION DU NOM BUTIA ODORATA

 

Larry Noblick souligne en tête de l'article précité que Butia odorata "a connu un parcours alambiqué pour devenir un nom valide". Il fournit les indications permettant de retracer l'historique de la validation du nom, que j'ai étoffé de quelques précisions, commentaires et photographies.

1891 : João Barbosa Rodriguez décrit pour la première fois l'espèce Cocos odorata, qui figurait parmi les plantes cultivées au jardin botanique de Rio de Janeiro. Référence : Plantas novas cultivadas no Jardim botanico do Rio de Janeiro, 1891, vol. 1, pp. 11-14, planches 4a et 5c.
 

Plantas Novas cultivadas no Jardim Botanico do Rio de Janeiro
 

1903 : João Barbosa Rodriguez reprend la description de Cocos odorata dans un ouvrage plus général, consacré aux palmiers du Brésil. Référence : Sertum Palmarum Brasiliensium, 1903, tome 1, pp. 92-93 et planche 68a.
 

Sertum Palmarum Brasiliensium
 

1916 : Odoardo Beccari, dans un article consacré au genre Cocos Linn., "accepte sans enthousiasme la dénomination de João Barbosa Rodriguez", selon Larry Noblick, et crée la variété Butia capitata var. odorata (Barb. Rodr.) Becc. Référence : Il genere Cocos Linn. e le Palme affini, Agricoltura Coloniale, anno 10, sem. 2, pp. 489–524. A la date de publication du présent article, seule la partie semestre 1 (pp. 1-328) de l'ouvrage est numérisée sur Internet. Toutefois, j'ai pu trouver un tiré à part de l'article datant de 1916 (couverture ci-dessous).
 

Il genero Cocos Linn. e le Palme affini
 

La qualification "sans enthousiasme" attribuée par Larry Noblick mérite un commentaire. Je me suis reporté au tiré à part de l'article, où Odoardo Beccari décrit la variété Butia capitata var. odorata Becc. en pages 63 à 65. Je n'y vois nulle trace de mauvaise volonté de la part d'Odoardo Beccari. Au contraire, la description est volumineuse, et les exemples de spécimens étudiés sont nombreux. Cocos odorata, décrite comme une espèce par João Barbosa Rodriguez, est simplement transférée au rang de variété de Butia capitata (Mart.) Becc. par Odoardo Beccari, conformément au principe qu'il expose de la grande variabilité de Butia capitata. Il souligne même que la variété Butia capitata var odorata Becc. est celle qui est la plus largement répandue dans les jardins de la région méditerranéenne. Mais, il est vrai qu'en tout début de l'article, en page 5, Odoardo Beccari critique sévèrement la qualité du travail global de João Barbosa Rodriguez et, concernant le palmier qui nous intéresse, indique "par exemple, les Cocos capitata et lejospatha se situent dans une section distincte de celle où se trouvent placés les C. odorata et pulposa, que l'on ne peut spécifiquement distinguer des deux autres qu'avec beaucoup de bonne volonté".

1979 : Sidney Fredrick Glassman, dans une révision du genre Butia, fait de Butia odorata et de Butia capitata deux synonymes, exposant qu'une étude complémentaire est nécessaire. Référence : Re-evaluation of the genus Butia with a description of a new species, Principes, vol. 23, pp. 65-79. A la date de publication du présent article, je n'ai pas trouvé de version numérisée de la revue sur Internet (Principes est l'ancien nom de la revue de l'International Palm Society, de 1956 à 1998. La revue a pris pour nom Palms depuis 1999). N'ayant pas pu retrouver la couverture du volume 23 de la revue Principes, je fournis ci-dessous en exemple la photographie de la dernière édition (1998).
 

Revue Principes de l'International Palm society
 

1995 : Andrew Henderson, dans un  ouvrage consacré aux palmiers des Amériques, retranscrit à la fin de sa description de Butia capitata une communication personnelle de Larry Noblick qui conclut que "la population méridionale pourrait peut-être être reconnue comme une espèce distincte, auquel cas Butia odorata serait le nom correct". Référence : Field Guide to the Palms of the Americas, page 137, A. Henderson, G. Galeano, R. Bernal, Princeton University Press. Note : le lien vers la page 137 peut afficher que la page n'est pas consultable (ouvrage en accès restreint). Parfois, il suffit de rafraîchir la page dans le navigateur pour qu'elle s'affiche...
 

Field Guide to the Palms of the Americas
 

2004 : Amauri Cesar Marcato, dans une thèse de doctorat, a créé le nom Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick ex Mercato, mais il n'a publié ni la thèse, ni le nom. Référence : Revisão taxonômica do gênero Butia (Becc.) Becc. e filogenia da subtribo Butiinae Saakov (Palmae), PhD. Thesis, 2004, Instituto de Biociências da Universidade de São Paulo. A la date de rédaction du présent article, ce document n'est pas en accès libre sur Internet (dans la référence de la bibliothèque virtuelle de l'université, je note une différence de présentation du titre par rapport à la référence figurant dans l'article de Larry Noblick).

2004 : Harri Lorenzi et al. publient le nom Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick & Pirani, mais le transfert de nom a échoué car il manquait une référence au basionyme. Référence : Palmeiras Brasileiras e Exóticas Cultivadas, H. Lorenzi, H.M. Hermes, J.T. de Medeiros Costa, L.S.C. de Cerqueira, E. Ferreira, Instituto Plantarum de Estudos da Flora Ltda. A la date de publication du présent article, je n'ai pas trouvé de version numérisée de l'ouvrage sur Internet.
 

Palmeiras Brasileiras e Exóticas Cultivadas
 

2010 : Harri Lorenzi et al. publient le nom d'auteur Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick & Lorenzi, mais avec un basionyme erroné. Référence : Brazilian Flora Lorenzi Arecaceae (Palms), H. Lorenzi, L.R. Noblick, F. Kahn, E. Ferreira, Instituto Plantarum de Estudos da Flora Ltda. A la date de publication du présent article, je n'ai pas trouvé de version numérisée de l'ouvrage sur Internet.
 

Brazilian Flora Lorenzi Arecaceae (Palms)
 

2011 : Larry Ronald Noblick crée l’appellation Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick dans un article intitulé "Validation of the name Butia odorata", publié dans la revue Palms, vol. 55 (1), pp. 48-49.

 

JUSTIFICATION DE LA CRÉATION DE BUTIA ODORATA

 

Comment Larry Noblick justifie-t-il la création de l'espèce Butia odorata ? Larry Noblick expose dans son article que "the true" Butia capitata (le Butia capitata typique) a été décrit en 1826 sous le nom de Cocos capitata par Martius (1795-1868), qui l'avait découvert au Brésil, près de la ville de Montes Claros dans l'état du Minas Gerais. Je fournis la référence de l'ouvrage concerné, et les liens Internet : Historia Naturalis Palmarum, Carl F. P. von Martius, 1823-1853, vol. 2, pp. 114-115, tables 78, 79 et 101. Attention à l'erreur suivante : la table 80 porte l'indication Cocos capitata, mais, dans la vue d'ensemble des tables, page 152, l'auteur indique qu'il s'agit de Cocos coronata. Larry Noblick précise que Cocos capitata est un palmier endémique de la région centrale du Brésil appelée Planalto et qu'il affectionne le terroir du Cerrado (savane dense). Je me suis reporté à l'ouvrage précité et, en page 115, Carl F. P. von Martius précise que Cocos capitata croît dans la province du Minas Gerais, dans le désert entre la rivière Jequetinhonhoa et la région montagneuse appelée Serra de Santo Antonio.

Larry Noblick indique que ce palmier (Butia capitata typique) est très différent du palmier beaucoup plus robuste nommé également Butia capitata que l'on rencontre sur les côtes ou dans les terroirs de restinga (littoral sablonneux avec plantes herbacées) en Uruguay, et dans la province méridionale de Rio do Sul, au Brésil. Il indique aussi que c'est ce palmier méridional qui a été décrit sous le nom de Cocos odorata par João Barbosa Rodriguez en 1881 et 1903. Il précise que ce dernier a écrit que l'habitat naturel de ce palmier sont les régions du Rio Grande do Sul et l'île de Los Padres, près du Rio Cebollatí (Lagoa Mirim), en Uruguay.

Je me suis reporté aux ouvrages concernés et, en page 93 de celui de 1903, João Barbosa Rodriguez précise bien cet habitat pour Cocos odorata. En page 12 de l'ouvrage de 1891, il mentionne seulement Rio Grande do Sul. J'ai noté aussi qu'en fin de page 94 de l'ouvrage de 1903, il indique "C. Capitata Mart., vulgairement connu sus le nom de Cabeçudo, est originaire des forêts vierges de Minas-Giraes, et il fut confondu pour avoir été envoyé au professeur Drude sous le nom de C. capitata avec des exemplaires du C. odorata, espèce absolument distincte, qui est de Santa-Catharina aussi".
 

Régions citées pour Butia capitata et Butia odorata : sud-est du Brésil et Uruguay

Régions citées pour Butia capitata et Butia odorata : sud-est du Brésil et Uruguay.
(Crédit de la carte impossible à déterminer).
 

Pour Larry Noblick, deux espèces différentes étaient regroupées sous le nom Butia capitata (Mart.) Becc. : l'une, le Butia capitata typique, correspondant au basionyme Cocos capitata Mart., et l'autre, transférée au rang de variété par Odoardo Beccari sous le nom Butia capitata var. odorata Becc., alors que João Barbosa Rodriguez l'avait décrite sous le nom d'espèce Cocos odorata Barb. Rodr. Par la création du nouveau nom d'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, il veut faire reconnaître la deuxième espèce distincte, et la détacher de l'appellation Butia capitata (Mart.) Noblick.

Le nouveau nom Butia odorata est donné à l'espèce robuste présente dans la province du Rio Grande do Sul (Brésil) et en Uruguay. Ce nom remplace Cocos odorata Barb. Rodr. (1891), qui reste son basionyme, et Butia capitata var. odorata (Barb. Rodr.) Becc. (1916), qui est devenu son synomyme. La fiche de la variété Butia capitata var. odorata (Barb. Rodr.) Becc. dans la base de données taxonomique The Plant List indique que ce nom est un synonyme de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick. Mais, Larry Noblick ne supprime pas le nom Butia capitata (Mart.) Becc., qui reste attribué à l'espèce moins robuste présente au Brésil dans la province du Minas Gerais et qui a été décrite en 1826 par Carl F. P. von Martius sous le nom de Cocos capitata Mart., qui est son basionyme.

 

CONSERVATION DU NOM D'ESPÈCE BUTIA CAPITATA

 

HISTORIQUE DU NOM

1826 : Carl Friedrich Philipp von Martius (1794-1868) décrit l'espèce Cocos capitata Mart. (référence : Historia Naturalis Palmarum, Carl F. P. von Martius, 1823-1853, vol. 2, pp. 114-115, tables 78, 79 et 101).
 

Carl Friedrich Philipp von Martius (1794-1868)

Carl Friedrich Philipp von Martius (1794-1868), créateur du nom Cocos capitata
(peinture de Leo Schöninger)
 

1916 : Odoardo Beccari (1843-1920) transfère l'espèce Cocos capitata Mart. dans le genre Butia et crée l'espèce Butia capitata (Mart.) Becc. Il crée en même temps sept variétés pour cette espèce, dont Butia capitata var. odorata Becc. (référence : Il genere Cocos Linn. e le Palme affini, Odoardo Beccari, Agricoltura Coloniale, anno 10, sem. 2, pp. 489–524). Voir page 57 du tiré à part de l'article, en date de 1916. 
 

Odoardo Beccari (1843-1920)

Odoardo Beccari (1843-1920), créateur du nom Butia capitata
(Musée d'histoire naturelle de Florence, section Botanique)
 

2011 : Larry Noblick publie l'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, qui remplace la variété Butia capitata var. odorata Becc. (article : Validation of the name Butia odorata, Larry Noblick, Palms, vol. 55 (1), pages 48-49, 2011). L'espèce Butia capitata (Mart.) Becc. est conservée pour désigner une espèce type. Les 7 variétés rattachées antérieurement à Butia capitata (Mart.) Becc. disparaissent.
 

Larry Ronald Noblick, créateur du nom Butia odorata

Larry Ronald Noblick, modificateur de la signification du nom Butia capitata
(crédit :
Montgomery Botanical Center)
 

Il faut retenir que depuis 2011 le nom d'espèce Butia capitata (Mart.) Becc. ne désigne plus la même chose que lors de sa création en 1916. De façon imagée, on peut considérer que Larry Noblick a réalisé en 2011 le transfert inverse de celui effectué par Odoardo Beccari 95 ans auparavant, en 1916. Il crée en 2011 l'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick en remplacement de la variété Butia capitata  var. odorata Becc., qu' Odoardo Beccari a créée en 1916 en remplacement de l'espèce Cocos odorata Barb. Rodr. que João Barbosa Rodriguez a créée en 1891. Ainsi, Larry Noblick soustrait la variété Butia capitata var. odorata Becc. de la signification de l'appellation Butia capitata (Mart.) Noblick qu'il a conservée. Mais il cantonne la signification de Butia capitata (Mart.) Becc. à une espèce type, celle décrite en 1826 par Carl F. P. von Martius sous le nom Cocos capitata Mart., écartant les six autres variétés de Butia capitata créées en 1916 par Odoardo Beccari, qu'il ne rattache pas à la nouvelle espèce Butia odorata.

 

SORT DES NOMS DE VARIÉTÉS

Larry Noblick ayant élevé au rang d'espèce la variété Butia capitata var. odorata Becc., il est logique que le nom de cette variété soit désormais classé en synonyme de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, comme le montrent la fiche de l'espèce et la fiche de la variété dans la base de données taxonomique The Plant List. Mais il faut souligner que Larry Noblick n'a pas renommé les six autres variétés de Butia capitata (Mart.) Becc. pour les rattacher à la nouvelle espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick. Il s'agit de Butia capitata var. pulposa, Butia capitata var. virescens, Butia capitata var. subglobosa, Butia capitata var. erythrospatha, Butia capitata var. elegantissima et Butia capitata var. lilaceiflora. Pour la création et la description des variétés, voir page 62 du tiré à part de l'article "Il genere Cocos Lin. e le Palme affini" (1916). Ces six variétés de Butia capitata (Mart.) Becc. sont classées désormais comme des synonymes de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, comme le montre la fiche de cette espèce dans la base de données taxonomique The Plant List. Dans la fiche de chacune de ces six variétés, il est indiqué qu'il s'agit d'un synonyme de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, par exemple dans la fiche de Butia capitata var. pulposa Becc. Dans la fiche de Butia capitata (Mart.) Becc. de la même base de données, ces variétés n'apparaissent pas.

Il faut noter que dans la fiche précitée, apparaît en synonyme une variété orthographiée liliaceiflora qu'il ne faut confondre avec la variété lilaceiflora. Le nom de variété liliaceiflora, qui possède sa propre fiche, distincte de la fiche de la variété lilaceiflora, est une corruption orthographique de lilaceiflora générée en 1916 dans un article de la Revue horticole et conservée à titre historique dans la base de données The Plant List, conformément aux règles qui régissent celle-ci. Le degré de confiance attribué à toutes les synonymies précitées est bas (une étoile). Ce degré de confiance bas résulte de l'application des règles automatisées de gestion de la base de données The Plant List. Ce degré de confiance bas semble curieux, mais il semble encore plus surprenant pour Butia capitata var. odorata Becc. En effet, pour cette variété, Odoardo Beccari indique clairement qu'il s'agit de l'espèce Cocos odorata Barb. Rodr., et Larry Noblick a pris cette dernière pour basionyme de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick.

 

INTERROGATIONS SUR L'INTÉRÊT DE LA CRÉATION DE BUTIA ODORATA

 

INTÉRÊT DE LA CRÉATION DU NOM BUTIA ODORATA

Pendant 40 ans, je n'ai pas eu de problèmes pour identifier et pratiquer Butia capitata (Mart.) Becc., dont le nom d'espèce a été utilisé 95 ans avant d'être remis en cause par Larry Noblick. Avant la création de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, c'est à dire avant 2011, j'appelais les palmiers concernés Butia capitata (Mart.) Becc. sans préciser de quelle variété il s'agissait. Etant convaincu que, d'une part, il n'y avait pas de plus-value pratique à le faire et que, d'autre part, ce n'était pas facile, voire c'était impossible, de le faire avec une vue globale et rapide de l'arbre (dans les parcs, les ensembles paysagers, les jardins...). A l'exclusion de Butia capitata var. pulposa Becc., facile à reconnaître par la taille de son fruit, et utile à nommer pour rechercher cette qualité rare...

Aujourd'hui, je suis obligé de préciser Butia capitata ou Butia odorata, en restant convaincu que cela n'engendre aucune plus-value pratique, mais en me heurtant à la difficulté de ne pas savoir le faire... Dit autrement : avant, je ne savais pas forcément distinguer les variétés de Butia capitata (Mart.) Becc. (à l'exclusion de la varité pulposa), mais cela n'avait aucune importance pratique, et je savais reconnaître l'espèce considérée et la désigner aux autres par son nom. Aujourd'hui, je ne sais pas plus qu'avant distinguer les anciennes variétés, mais cela me bloque pour donner un nom juste au palmier considéré car l'une des variétés a été élevée au rang d'espèce (Butia capitata var. odorata Becc.).

Suis-je le seul dans ce cas ? Peut-être, ou alors nous sommes peu nombreux car la quasi-totalité de ceux qui emploient aujourd'hui Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick se contentent de faire comme si cette appellation avait remplacé Butia capitata (Mart.) Becc., ce qui est faux. Qui peut le plus peut le moins, mais pas l'inverse : avec Butia capitata (Mart.) Becc., on englobait l'espèce appelée aujourd'hui Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, mais avec Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick on ne désigne pas Butia capitata (Mart.) Becc. Au contraire, on signifie explicitement que l'on ne veut pas parler de Butia capitata (Mart.) Becc., c'est à dire le Butia capitata nommé et décrit par Odoardo Beccari. On signifie aussi implicitement que l'on affaiblit le sens de cette appellation conservée en soustrayant l'ancienne variété Butia capitata var. odorata Becc. de ce qu'elle désigne encore (ainsi que les six autres variétés de Butia capitata créées par Odoardo Beccari).

Au terme de cette réflexion, je suis tenté de déduire que la création de l'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick a créé une complexification sans plus-value pratique, et conduit même à une difficulté de désignation de la bonne espèce dans la pratique quotidienne des palmiers considérés. On pourra objecter que je traite le sujet sous l'angle du bon sens pratique, et non sous celui de la rigueur scientifique : si le palmier anciennement nommé Butia capitata var. odorata Becc. est très différent de l'espèce type, au point qu'il mérite un nom d'espèce et non de variété, la rigueur scientifique impose de créer un nom d'espèce pour le nommer. Dans ce cas, on rectifie une erreur, ou tout au moins une approximation, d'Odoardo Beccari, et ce n'est que l'application d'un des principes de l'avancée de la science dans tous les domaines : rectifier ou affiner ce que les plus anciens ont énoncé...  

Je réponds simplement qu'en m'interrogeant sur la complexification engendrée par la nouvelle nomenclature, je ne fais que souligner la simplicité de l'ancienne nomenclature, celle d'Odoardo Beccari, basée sur un principe général énoncé par ce dernier, que j'ai pu vérifier par moi-même : l'espèce Butia capitata (Mart.) Becc. est très variable, et mieux vaut l'aborder comme un ensemble de variétés.

 

AMBIGUÏTÉ GÉNÉRÉE PAR LA CONSERVATION DU NOM BUTIA CAPITATA

La difficulté que je ressens pour utiliser le nom d'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick se trouve aggravée par la génération d'une ambiguïté au niveau du nom d'espèce conservé Butia capitata (Mart.) Becc. En effet, on continue à accoler le nom d'auteur (Mart.) Becc. au nom d'espèce Butia capitata alors que ce nom d'espèce, à compter de 2011, ne désigne plus ce que l'auteur a décrit en 1916... L'espèce que l'on désigne désormais sous le nom Butia capitata (Mart.) Becc. est celle décrite par Carl F. P. Martius en 1826 sous le nom de Cocos capitata, et non celle décrite par Odoardo Beccari en 1916, qui a une signification beaucoup plus large. L'appellation Butia capitata(Mart.) Becc. est désormais un polysème.

Elle désigne par le même nom deux contenus différents, c'est à dire à la fois ce qu' Odoardo Beccari a voulu signifié et ce que Larry Noblick veut signifier désormais. Pour Larry Noblick, il fallait mettre fin à la polysémie de Butia capitata (Mart.) Becc. au niveau des deux espèces qu'il juge distinctes, mais la création de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, qui a mis fin à cette polysémie, en a créé une autre au niveau du même nom Butia capitata (Mart.) Becc. en lui donnant une deuxième acception. Ainsi, pour savoir ce que signifie l'appellation Butia capitata (Barb. Rodr.) Noblick rencontrée dans un texte, il faut, d'une part, se reporter à la date de rédaction du texte (avant ou après mars 2011, date de la publication de l'article de Larry Noblick) et, d'autre part, être certain que l'auteur a accepté le changement de signification de cette appellation ou, dans le cas d'une publication proche de celle de l'article de Larry Noblick, en a tenu compte à temps...

 

CONSÉQUENCE DE LA NON CRÉATION DE VARIÉTÉS DE BUTIA ODORATA

Nous avons vu que parmi les sept variétés de Butia capitata (Mart.) Becc., une (odorata) a été élevée au rang d'espèce. Le fait que les six autres variétés soient aujourd'hui considérées comme des synonymes de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, sans avoir été renommées, peut être interprété comme la négation de l'utilité de les distinguer de l'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick, en fait comme la négation de leur existence réelle. Ainsi, l'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick n'a pas de variétés, et l'espèce Butia capitata (Mart.) Becc., dans son acception actuelle, n'en a plus.

Pourtant, pour moi, il existe bien la variété Butia capitata var. pulposa Becc., à très gros fruits pulpeux, qui est très rare dans la région méditerranéenne, et dont je me suis attaché à localiser des spécimens au fil des années. Cette variété était d'ailleurs considérée comme une espèce (Cocos pulposa Barb. Rodr.) par João Barbosa Rodriguez (Plantas novas cultivadas no Jardim botanico do Rio de Janeiro, 1891, vol. 1, pp. 14-15, planche 4b). Ne disposant plus de nom pour la désigner, je continue à l'appeler Butia capitata var. pulposa Becc. Je ne me prononce pas sur les variétés lilaceifloa, erythrospatha, subglobosa, virescens et elegantissima, dont j'ai seulement lu la description et que je laisse aux spécialistes des palmiers, ou aux amateurs de palmiers à titre ornemental (alors que je m'intéresse prioritairement à leur aspect fruitier).

 

CONCLUSION RELATIVE A LA CRÉATION DU NOM BUTIA ODORATA

En conclusion de ma réflexion, j'indique simplement que si j'ai exprimé des interrogations sur l'intérêt pratique, soulevé des difficultés induites, et souligné une erreur d'interprétation fréquente (la nouvelle espèce remplace l'ancienne...),  je n'exprime pas de position sur le bien-fondé scientifique de la création de l'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick. Cette création, qui émane de Larry Noblick, un des plus grands spécialistes des palmiers d'Amérique du Sud, qui a longuement étudié dans les diverses parties du Brésil l'espèce Butia capitata, semble avoir reçu l'assentiment général. Je n'ai pas trouvé sur Internet de débats sur le sujet, ni de contradicteur déclaré parmi les scientifiques.

C'est à ce demander pourquoi l'ancienne nomenclature a été utilisée 95 ans sans remise en cause, tout au moins sur le point particulier de l'espèce ou la variété considérée, objet de la rectification de Larry Noblick... J’ai toutefois remarqué que Butia odorata ne figure pas dans la base de données du site de l'association des botanistes francophones Tela Botanica, cinq ans après la création de ce nom. On y trouve seulement la fiche de Butia capitata. Doit-on y voir une opposition implicite à la nouvelle nomenclature avancée par Larry Noblick ? En tout état de cause, pour me sentir à l'aise avec la nouvelle nomenclature, je ressens le besoin de connaître les différences entre Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick et Butia capitata (Mart.) Becc. dans sa signification depuis 2011. Plus simplement, je me pose la question : comment puis-je reconnaître Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick ?

 

RECONNAÎTRE BUTIA ODORATA

 

INDICATIONS DE LARRY NOBLICK

Dans son article, Larry Noblick indique que Butia odorata est une espèce très différente de Butia capitata, mais il nous donne seulement deux différences : l'habitat d'origine au Brésil et la vigueur de la plante. Concernant l'habitat naturel, celui-ci peut aider lorsque l'on connaît l'origine géographique des graines que l'on sème ou du plant que l'on achète, mais il n'a pas d'utilité lorsque l'on se trouve en face d'un spécimen rencontré au hasard de ses promenades et voyages en région méditerranéenne, ou en toute autre région à climat doux en France.

Larry Noblick ne fournit pas d'indication d'une éventuelle différence de rusticité entre Butia odorata et Butia capitata. Compte tenu que l'habitat naturel de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick est nettement plus méridional (2.500 km séparent Belo Horizonte, capitale du Minas Gerais, de Montevideo, capitale de l'Uruguay), on pourrait s'attendre (s'agissant de l'hémisphère austral) à une résistance au froid nettement plus élevée pour cette espèce. Concernant la vigueur de l'espèce, Larry Noblick indique que Butia odorata est une espèce plus robuste que Butia capitata. Et il assortit l'article de la photographie suivante.
 

Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick : un spécimen près de Rocha, en Uruguay

Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick : un spécimen près de Rocha, en Uruguay.
(crédit : Larry Noblick).

 

La photographie fournie par Larry Noblick montre un stipe de dimensions rares dans la région méditerranéenne. Les hauteurs de stipes les plus courantes que j'ai observées sont de 3 à 4 m et je n'ai pas rencontré pour ma part de spécimens avec un stipe supérieur à 6 m. En toute rigueur, on peut suspecter l'influence du terroir méditerranéen français (sol, climat) qui n'est pas le terroir d'origine de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick. On peut aussi avancer que la majorité des individus que l'on rencontre sur le littoral méditerranéen sont jeunes, mais ce n'est pas le cas pour tous les spécimens que l'on peut y trouver.

J'ai noté que dans la description de Cocos odorata par João Barbosa Rodriguez, le stipe a pour hauteur 2 à 3 m (et pour largeur 0,60 à 0,70 m) dans la version de 1891, alors qu'il a pour hauteur 2 à 8 m (et pour largeur 0,60 à 0,70 m) dans la version de 1903. J'ai également noté que dans la description de Butia capitata, Odoardo Beccari indique que le stipe fait 4-5 m de haut et 40 à 50 cm de diamètre. Carl F. P. von Martius indique dans sa description de Cocos capitata une hauteur du stipe de 10 à 12 pieds (soit 3 à 3,6 m), sans précision de largeur. La figure associée à Cocos capitata fournit une indication intéressante. Rapportée à la taille du Nandou d’Amérique (1,4 m) sur la figure, la taille du stipe de Cocos capitata est de 3 m. Selon les indications de Carl F. P. von Martius, reprises par Odoardo Beccari, il s'agit d'un individu déformé et amoindri par le feu, les habitants de la région utilisant le feu pour régénérer les pâtures.

En tout état de cause, la hauteur indiquée par João Barbosa Rodriguez (2-8 m) signifie qu'il existe des spécimens de Butia odorata plus petits que ceux de Butia capitata décrits par Odoardo Beccari (4-5 m) et Carl F. P. von Martius (3,6-4 m), pour ce dernier sous le nom de Cocos capitata. On ne peut donc rien déduire de la hauteur pour distinguer les deux espèces, sauf pour les spécimens qui dépassent les 5 m de stipe (donc ceux avec un stipe de 5 à 8 m), rares en région méditerranéenne. En conclusion, mon besoin de savoir reconnaître Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick n'est pas satisfait par l'article de Larry Noblick qui crée ce nom d'espèce. Il est regrettable que Larry Noblick n'ait pas assorti la création du nom Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick d'une description détaillée de cette espèce, et surtout de la mise en exergue de caractères morphologiques distinctifs avec l'espèce Butia capitata (Mart.) Becc. qui a été conservée (vidée d'une grande partie de sa signification originelle...).

 

AUTRES INDICATIONS DISPONIBLES

Je pense que des descriptions de Butia odorata et/ou de ses caractères distinctifs par rapport à Butia capitata figurent dans les trois derniers documents cités par Larry Noblick dans son article lorsqu'il retrace l'historique de la création du nom de l'espèce : la thèse de A. C. Marcato (2004), Palmeiras Brasileiras e Exóticas Cultivadas (2004) et Brazilian Flora Lorenzi Arecaceae (Palms) (2010). Je n'ai pas pu consulter ces documents car, à la date de publication du présent article, il n'en existe pas de version numérisée sur Internet. J'ai toutefois essayé de trouver les différences morphologiques entre Butia capitata (Mart.) Becc. et Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick dans des ouvrages ou documents disponibles sur Internet, en effectuant des recherches en diverses langues (français, anglais, italien, espagnol et portugais). Voici les résultats de mes recherches.

Une équipe composée de chercheurs de deux universités brésiliennes a publié une étude anatomique comparée du limbe des feuilles de Butia odorata et de Butia capitata, au microscope optique et au microscope électronique. Référence : Butia capitata (Mart.) Becc., Lamina anatomy as a tool for taxonomic distinction from B. odorata (Barb. Rodr.) Noblick comb. nov. (Arecaceae), Bruno F. Santa'Anna-Santos, Wellington G. O. Carvalho júnior, Vanessa B. Amaral, Anais da Academia Brasileira de Ciências, vol.87, no.1, Rio de Janeiro, 2015. Les conclusions de cette étude au microscope n'ont pas d'intérêt pratique pour reconnaître Butia odorata dans le paysage, mais j'ai noté quelques éléments d'information concernant les différences morphologiques que je recherchais. En introduction, les auteurs justifient l'étude en indiquant que la distinction entre les deux espèces est, selon leurs propres termes, "basée seulement sur un faible nombre de différences morphologiques, ce qui induit un besoin d'études additionnelles pour conforter la séparation des espèces". Et, dans le corpus de l'étude, ils précisent que, selon Lorenzi et al., dans Brazilian Flora Lorenzi Arecaceae (Palms), 2010, ces différences morphologiques consistent "seulement en un caractère du pétiole et en la taille du fruit et la forme de l'endocarpe, qualifiées (par Lorenzi et al.) de légèrement différentes".

J'ai trouvé dans une thèse de doctorat brésilienne de décembre 2011 une précision sur le caractère du pétiole évoqué ci-dessus. Référence : Propagação de Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick & Lorenzi, Tese de Doutorado, Claudimar Sidnei Fior, Universidade Federal do Rio Grande do Sul, Faculdade de Agronomia, Porto Alegre, 2011. En page 6 de la thèse, l'auteur indique que selon Lorenzi et al., dans Brazilian Flora Lorenzi Arecaceae (Palms), 2010, une des différences morphologiques entre les deux espèces est "la formation de structures similaires à des dents incurvées à la base des pseudopétioles de Butia odorata alors que pour Butia capitata, à la place des structures dentées il y a seulement le développement des fibres". Je comprends plus simplement que le pétiole de Butia odorata a les bords dentés alors que celui de Butia capitata a les bords lisses.

Si cette information est avérée, elle constitue un moyen pratique de distinguer les deux espèces dans le paysage méditerranéen (sans pour autant justifier de façon indiscutable la séparation des espèces... Même ajoutée aux différences d'origine géographique et de robustesse indiquées par Larry Noblick dans son article). Concernant les autres différences morphologiques (taille du fruit et forme de l'endocarpe "légèrement différents"), je n'ai pas trouvé de précisions lors de mes recherches. Mais les fruits de Butia odorata et ceux de Butia capitata se caractérisent par une grande variabilité, notamment dans la taille et dans la forme. Je l'ai constaté personnellement sur les spécimens présents sur le littoral méditerranéen, et en ai rendu compte par un article que j'ai publié en 2005 et dans lequel j'ai utilisé le seul nom valide à l'époque : Butia capitata (Mart.) Becc.

J'en ai trouvé la confirmation dans une thèse de doctorat brésilienne de 2013 traitant notamment des descripteurs de l'espèce Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick. Référence : Caracterização de recursos genéticos de Butia odorata no Bioma Pampa, Claudete Clarice Mistura, Tese de Doutorado, Universidade Federal de Pelotas, Faculdade de Agronomia Eliseu Maciel, Pelotas, 2013. La thèse est subdivisée en 4 article, et les articles 3 et 4 traitent respectivement de la diversité morphologique de Butia odorata et des descripteurs correspondants. Dans l'article 3 de la thèse, pages 58-59, l'auteur expose la grande variabilité des fruits de Butia odorata au niveau de la taille et de la forme, mais aussi de la couleur, de la texture, du goût, et de la saison de maturité. Cette variabilité ressort de l'observation pendant les années 2010 à 2012 de 303 spécimens répartis sur 750 ha dans la région de Tapes, province de Rio Grande do Sul, au Brésil, mais aussi de diverses autres observations citées par l'auteur. En page 59, est relevée aussi la variabilité importante du fruit de Butia capitata dans la province du Minas Gerais, avec référence à la publication concernée. Dans l'article 4 de la thèse, la grande variabilité du fruit de Butia odorata se traduit dans les descripteurs établis selon la norme de Biodiversity International (ex IPGRI). Ceux relatifs au fruit sont fournis en pages 73-75, avec le dessin des différentes formes de fruit rencontrées.

Si la taille et la forme du fruit paraissent devoir être abandonnées pour distinguer Butia odorata de Butia capitata, la forme de la graine pourrait fournir une indication. Selon certains palmophiles, la forme du noyau des fruits serait un caractère à prendre en considération : noyau rond pour Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick et noyau allongé pour Butia capitata (Mart.) Becc. et Butia catarinensis Noblick & Lorenzi. Je n'ai pas trouvé le critère d'identification par la graine lors de mes recherches parmi les documents scientifiques publiés, mais cette piste mérite d'être approfondie. Toutefois, pour moi, la différence de forme de la graine n'aurait pas d'utilité pour la reconnaissance de l'espèce Butia odorata si l'on dispose réellement d'un critère distinctif visible même en l'absence de fructification (caractère denté du pétiole). Mais elle serait un critère de confirmation de l'espèce Butia odorata (dans le cas de graines rondes).

D'autre part, j'ai comparé les descriptions fournies par Carl F. P. von Martius, João Barbosa Rodriguez et Odoardo Beccari, mais je crains que les résultats de cette comparaison ne constituent des informations spécifiques aux individus peu nombreux observés par les auteurs, donc obsolètes par rapport aux observations des chercheurs contemporains portant sur un nombre élevé de spécimens.

 

CONCLUSION RELATIVE AUX CRITÈRES D'IDENTIFICATION

A titre temporaire, tant que je n'aurai pas eu accès aux trois documents cités supra dans lesquels se trouvent des informations complémentaires à celles de l'article de Larry Noblick, je retiens les critères suivants pour reconnaître Butia odorata (Barb. Rodr.) Noblick. Indépendamment de l'origine géographique du plant ou de la graine dont est issu le plant, information dont on dispose rarement : si le stipe fait de 2 à 5 m, cela peut être Butia odorata ou Butia capitata, si le stipe dépasse 5 m, et notamment, pour avoir une marge de sécurité, s'il fait 6 à 8 m de hauteur, il s'agit de Butia odorata.

Si le pétiole de la feuille est à bords dentés il s'agirait de Butia odorata, si le pétiole est à bords lisses, il s'agirait de Butia capitata. L'examen de la forme de la graine (si ce critère est avéré...) n'est pas utile car le caractère denté ou non du pétiole est un critère discriminant même en l'absence de fructification. Mais, n'ayant pas l'expérience de la discrimination des deux espèces sur le terrain, dans ma région du littoral méditerranéen, je ne suis pas certain que le caractère distinctif du pétiole soit avéré dans tous les cas.

 

 

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