Les fruitiers rares
 
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Article publié en 2004, enrichi en 2019.
Auteur : R. HUET.
Première publication 1986.
Photographies réservées
 .

 

 

Le cédrat méditerranéen et le cédrat de Corse

 

 

 

R. HUET, alors directeur du centre CIRAD de Montpellier, a publié cet article en 1986, revue Fruits, vol. 41, n° 2, pages 113 à 119, en collaboration avec C. CASSIN et J. JACQUEMONT (station agrumicole de Corse INRA-INFA, San Giuliano), et avec l'aide technique de Régine DALNIC (CIRAD Montpellier). Il y traite du cédrat (Citrus medica L.) sous divers aspects (description, origine botanique, variétés, lieux de culture, caractères de la pulpe et de l'huile essentielle du zeste, agroindustrie), et il termine par des considérations sur l'avenir du cédrat de Corse. Nous fournissons de larges extraits de l'article, et nous l'avons illustré de photographies. En 2019, nous avons ajouté un chapitre rédigé par Marc Antoine ROCCHESANI pour illustrer le renouveau du cédrat de Corse.

 

DESCRIPTION

 

Le cédratier, Citrus medica L., est un arbuste de 3 à 4 m de haut, n'atteignant jamais ni une grande taille ni un grand âge, de port très ouvert, les branches souvent épineuses et retombantes. Les feuilles vert clair se caractérisent par un pétiole non articulé, non ailé.
 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : épines et boutons floraux

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : épines et boutons floraux.
Crédit : François DROUET.

 

Il produit toute l'année des fleurs de grande taille, pourpres ou blanches suivant que le fruit est acide ou doux, avec une proportion variable de grandes fleurs mâles caractérisées par l'avortement du pistil.
 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fleur

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fleur.
Crédit : François DROUET.

 

Les fruits, oblongs à sphériques, à surface plus ou moins verruqueuse, peuvent atteindre une grande taille.
 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruit en formation

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruit en formation.
Crédit : François DROUET.

 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruits mûrs

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruits mûrs.
Crédit : Robert KRAN.

 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruits (à droite, fruit mûr)

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruits (à droite, fruit mûr).
Crédit : Robert KRAN.

 

Ils ont une écorce très épaisse, à l'albedo très développé se prolongeant entre les carpelles.
 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruit

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : fruit.
(photographie extraite d'une copie de l'article original).

 

La pulpe, en conséquence très réduite, est peu juteuse. Le jus peut être aussi acide que celui du citron ou tout à fait insipide. La pulpe renferme de nombreuses graines à cotylédons blancs et à dominance monoembryonnaire.
 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : intérieur du fruit mûr

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : intérieur du fruit mûr.
Crédit : Robert KRAN.

 

ORIGINE BOTANIQUE - VARIETÉS

 

On s'accorde à situer l'origine du cédratrier dans les vallées méridionales de l'Himalaya et en Indochine car on y trouve encore de nombreux arbres de cette espèce à l'état sauvage, purs ou hybridés naturellement. Acclimaté en Perse (Médie) dans la première moitié du premier millénaire avant J.C., il aurait été remarqué par les botanistes qui accompagnaient l'expédition d'Alexandre-le-Grand, et ramené avec eux en Grèce et dans le Bassin méditerranéen au IVe siècle, 325 ans avant J.C., sous le nom de pomme de Médie.

On reconnaît également une introduction du cédrat en Palestine, à une date sans doute antérieure car les Hébreux avaient de fréquents rapports avec les Perses et les Assyriens. Le cédrat paraît avoir été évoqué dans la Bible sous le nom de « Hadar » (Lev. 23 : 40), et les Juifs qui commémorent tous les ans leur errance dans le désert du Sinaï sous la conduite de Moïse lors de la « fête des Tabernacles » ont coutume de se présenter à la synagogue avec des bouquets de myrte, de saule et de palmes auxquels sont attachés des cédrats. Une variété particulière convient plus spécialement à cette cérémonie. C'est un fruit de petite taille, à chair acide, appelé cédrat 'Ethrog', ou 'Cédrat de Jericho'. Il est principalement cultivé à Corfou.

Chez les Romains, le cédrat fut décrit par Virgile, Dioscorides, qui le trouva acclimaté en Sicile, et par Pline dans son Histoire naturelle. Ils lui attribuaient des vertus thérapeutiques d'antidote contre les poisons. Pline attribuait également au cédrat le pouvoir d'assainir l'atmosphère et d'écarter les insectes. Le cédratier, culture de luxe pour les riches Romains, a survécu aux invasions barbares et, au Xe siècle, cultivé dans la région de Salerne, il donne lieu à un commerce florissant avec les Juifs d'Italie, de France et d'Allemagne. Actuellement, le cédratier de variété 'Liscia di Diamante' est surtout cultivé en Calabre. La production est destinée à la confiserie, industrie concentrée dans la région de Livourne.

Cependant, c'est en Crète que la culture du cédrat témoigne du plus grand dynamisme, avec les cultivars à chair acide 'Policarpos' et 'Limoniformis'. Remarqué grâce à ses propriétés ornementales et odorantes, le cédrat fut également diffusé en Chine et au Japon. On trouve en Extrême-Orient une variété quelque peu monstrueuse, 'La Main de Bouddah', dont l'extrémité apicale des carpelles est libre et forme autant de doigts bien séparés. Le cédrat agrémente les jardins arabes. Une variété se rencontre uniquement dans les jardins de Damas : le 'Kabaab'. Au Maroc, on trouve également des variétés typiques comme le 'M'Guergueb' de Berkane.

Enfin, dans le Nouveau Monde, les Espagnols ont introduit le cédrat qui s'est diversifié en variétés à pulpe douce ou acide : 'Cidra Dulce de Mulgoba', 'Topes de Collantes',  'Shaddock cubain' (hybride) à Cuba,  'Cidra de Porto-Rico' acide qui donne lieu à une importante industrie de confiserie (85 p. 100 du marché mondial actuellement). Des introductions ont eu lieu également au Mexique, puis en Californie par les pères missionnaires espagnols. L'origine du cédrat de Corse est inconnue, mais il représente une variété typique à pulpe douce.

 

LIEUX DE CULTURE

 

Situation de la Corse par rapport aux autres pays méditerranéens : à cause de sa sensibilité au froid et à la chaleur, la culture commerciale du cédrat se restreint aux régions où les hivers sont doux et les étés tempérés. C'est pourquoi les principales régions de culture du cédrat sont la Grèce continentale et insulaire, l'Italie méridionale et la Corse.

Les plantations grecques sont principalement localisées dans l'île de Crète et dans le Péloponèse. L'ensemble des plantations couvre 340 ha et la production annuelle de fruits en 1982 a été de 88.800 quintaux. Dans ces régions l'intérêt pour le cédrat est assez récent et date du début des années 1970. En effet, de 1970 à 1974 le nombre de plants est passé de 276.000 à 398.000 et la production de fruits de 38.290 à 88.800 quintaux. A côté des principaux cultivars 'Policarpe' et 'Limoniformis', qui occupent 90 p. 100 des plantations, on réserve quelques surfaces aux 'Kini', 'Ludaiki' et  'Romaiki' (Ethrog) à l'usage du rite religieux hébraïque. La commercialisation des fruits est assurée par l'Association du cédrat.

En Italie, les cultures industrielles de cédrat couvrent 164 ha, principalement dans la province de Cosenza (Calabre) le long de la côte tyrrhénienne, plantés à 90 p. 100 en 'Liscia di Diamante'. Mais on trouve également de petites cultures familiales en Sicile couvrant en tout 42 ha. L'ensemble de la production annuelle représente 22.200 quintaux. Destinés à la confiserie, les fruits mis en saumure sur place sont traités ensuite à Livourne (Toscane). Cependant, de petites quantités sont destinées à l'extraction de concentrés aromatiques utilisés comme stimulants en pharmacie ou comme composants de parfums. La production d'huile essentielle est pratiquement inexistante. Les Italiens distinguent deux types d'huile essentielle : cédrat et cedrino. Depuis l'entrée de la Grèce dans le Marché commun, les Italiens prennent très au sérieux la concurrence crétoise; et font de gros efforts pour sauvegarder leur propre production. On peut assurer que la production corse ne leur cause pas le même souci.

La culture du cédrat de Corse a connu son apogée à la fin du XIXe siècle. Vers 1920, la production annuelle dépassait 8.000 tonnes, sur environ 1.000 ha. Au début des années 50, la Corse fournissait encore le tiers du marché mondial de cédrat en saumure. En effet, bien que situé à la limite septentrionale de son aire de développement, ou peut-être à cause de cela, le cédrat de Corse était particulièrement apprécié pour la fraîcheur et la suavité de son arôme.

Qu'en reste-t-il ? En 1981-82, on a pu dénombrer 5 ha consacrés encore à cette culture, soit en tout 2.443 pieds en culture et 122 pieds isolés. Cette surface représente 0,2 p. 100 de la surface totale consacrée aux agrumes, dont la plus grande partie est réservée au clémentinier. En 1981-82, 903 quintaux de fruits ont été récoltés et commercialisés à 90 p. 100 par des grossistes. Les deux tiers des fruits proviennent de petites exploitations de moins de 0,5 ha.

Dans le cadre des mesures destinées à équilibrer les ressources des pays méditerranéens de la CEE ayant à faire face à l'entrée de l'Espagne et du Portugal dans le Marché commun, des crédits ont été alloués aux producteurs corses pour qu'ils deviennent plus compétitifs, et qu'ils puissent diversifier leurs cultures. L'aide à la production de cédrat a été évoquée mais il ne semble pas que les producteurs soient très motivés. Cependant, la Station de Recherches Agronomiques de San Giuliano conduit quelques expériences sur des porte-greffes plus adaptés que le bigaradier, pour améliorer la résistance au froid et la résistance à la gommose à Phytophthora.

Note de François Drouet (2011) : l'article a été écrit en 1986, et les données économiques de production ont fortement varié par la suite. Situation en 2011 : la production de Crète a pratiquement disparu, et celle de Porto-Rico s'est également effondrée. La surface de production de Calabre est seulement de l'ordre de 40 ha. Ce n'est pas pour autant que le cédrat de Corse a connu un fort développement : sa culture est limitée à une dizaine d'hectares, ce qui est bien sûr le double de la surface recensée en 1981-82, mais ce qui représente somme toute une activité économique marginale. Fin de note.

 

CARACTÈRES DE LA PULPE ET DE L'HUILE ESSENTIELLE DE ZESTE

 

L'arôme du cédrat constitue son attrait principal. Les caractères gustatifs de la pulpe du fruit présentent peu d'intérêt pratique pour la raison évidente que cette pulpe est réduite à sa plus simple expression, et qu'il est très difficile d'obtenir quelques gouttes de jus en pressant les carpelles. Cependant, le goût acide ou doux de cette pulpe permet de caractériser le fruit. Or le cédrat de Corse est un cédrat doux. Sa pulpe ne contient pratiquement pas d'acides, et en cela il est unique parmi les cédrats cultivés industriellement. Cette absence d'acidité n'est pas exceptionnelle parmi les agrumes, et nous avons pu décrire divers cas d'oranges, de citrons et de limettes dépourvus d'acidité. Il s'agit probablement d'une mutation de cédrat acide, et ce qui en fait l'intérêt c'est sa localisation en Corse et sa généralisation à l'ensemble de l'île. Par suite de la raréfaction des échanges, les caractères insulaires sont souvent singuliers.

L'odeur particulière et suave du cédrat provient de l'huile essentielle de zeste du fruit, dont l'étude a été réalisée en 1980 par l'équipe italienne de la Station expérimentale de Reggio di Calabria, dirigée par le professeur di Giacomo. Elle a porté sur le cultivar 'Liscia di Diamante', mais les auteurs distinguent une autre provenance : Citrus medica var. gibocarpica, appelée  'Cedrino', à fruits plus petits.

L'huile essentielle contenue dans les glandes oléifères du zeste a été extraite au début du siècle par un procédé vraisemblablement manuel à l'époque avec un rendement de 0,3 p. 1000 ; 0,45 p. 1000 pour le 'Cedrino'. L'huile essentielle, de couleur jaune pâle à légèrement verdâtre, exhale un parfum caractéristique rappelant celui de l'huile essentielle de citron, mais en plus fin et plus « chaud ». Le parfum est particulièrement apprécié pour sa note de tête. Par ailleurs, il convient de préciser que cette essence ne se trouve pas régulièrement sur le marché, et que le produit commercial est une reproduction obtenue à partir d'huiles essentielles d'orange douce, de citron, de bergamote et de divers terpènes.

Les auteurs, pour leur part, ont réalisé des analyses d'huile essentielle de cédrat et de 'Cedrino' sur les échantillons extraits d'un broyat de zeste par l'éther éthylique. Sur le plan qualitatif, la composition de l'huile essentielle de cédrat est très semblable à celle de l'huile essentielle de citron, les différences rapportées portent sur l'aspect quantitatif (entres autres : absence de sabinène, citral en quantité plus élevée, absence de bergamotine dans la fraction non volatile...).

Des échantillons de quelques kilos de fruits nous ont été envoyés par nos collègues de la station expérimentale de San Giuliano. Nous avons extrait l'huile essentielle de deux manières : par prélèvement direct à la seringue dans une glande à huile essentielle, ou par broyage du zeste et extraction à l'éther de pétrole (le solvant a ensuite été évaporé sous un léger courant d'azote). Le premier échantillon, par son origine très ponctuelle, présente des caractéristiques assez anormales en ce qui concerne la teneur en citral. Le deuxième échantillon, extrait sur l'ensemble de l'écorce des fruits, a donné des chiffres beaucoup plus rapprochés de ceux qui ont été obtenus par l'équipe du professeur di Giacomo en ce qui concerne le citral.

 

AGROINDUSTRIE

 

LE CÉDRAT CONFIT

Le cédrat, fruit parfumé mais peu juteux, ne se prête pas à la consommation directe, mais il est très apprécié sous forme de fruit confit. Dans un premier temps, le fruit subit une préparation en saumure. Suivant le procédé traditionnel empirique, les cédrats entiers ou coupés en morceaux sont conservés dans des tonneaux remplis d'eau de mer. Il se produit alors une fermentation aux conséquences favorables : l'amertume de l'écorce disparaît, le mésocarpe devient translucide, les tissus s'amollissent et la préparation peut alors absorber du sirop de sucre à haute concentration. Cette première opération prend au moins cinq à dix jours, suivant la température et la grosseur des morceaux de fruit, mais elle peut se prolonger plusieurs mois pour les fruits entiers.

Les chercheurs de Porto-Rico ont étudié systématiquement le procédé, et ont mis au point une technique plus élaborée permettant de réduire la durée de la fermentation. L'eau de mer est remplacée par une saumure à 10 p. 100 de chlorure de sodium et 0,2 p. 100 de chlorure de calcium ; la température est maintenue entre 27 et 32 °C ; les fruits sont coupés en quatre morceaux, la pulpe centrale et les pépins étant écartés. De cette façon la durée de la fermentation peut se réduire à deux jours, et la saumure recyclée après centrifugation.

Après la phase de fermentation, les fruits ou morceaux de fruits sont plongés dans une saumure fraîche. Ils s'y conservent un temps indéfini. Le confisage : les cédrats fermentés, tirés de leur saumure, sont rincés successivement dans deux bains d'eau chaude. Après égouttage, ils sont plongés dans des bains de sirop de sucre chaud de concentration croissante, suivant les techniques spécifiques des confiseurs. Puis, après un glaçage rapide dans l'eau fraîche, ils sont égouttés et séchés dans des conditions précises de température (19-20° C) et d'humidité relative. Le cédrat confit entier était jadis commercialisé sous le nom de Poncire.

 

LA PÂTE DE CÉDRAT

Une autre préparation, de type pâte de fruit, peut être réalisée avec le cédrat suivant la formulation suivante : morceaux de cédrat en saumure, rincés : 1 part ; sucre : 1,2 part ; pectine (éventuellement) ; acide citrique : jusqu'à pH 4 ; eau : 0,2 part.  Le mélange broyé est porté à ébullition jusqu'à la concentration de 70° Brix, puis il est moulé, refroidi, séché et emballé. L'opération doit être strictement contrôlée pour obtenir l'aspect, la couleur et la texture désirés.

 

AVENIR DU CÉDRAT DE CORSE

 

La singularité du cédrat de Corse, apportée par le caractère non acide de sa pulpe, ne semble pas se répercuter sur la composition de son huile essentielle. En cela, le cédrat se comporte comme les autres agrumes à fruits doux que nous avons pu étudier. Plus riche en citral que le citron, et différant aussi par la teneur en quelques terpènes, l'huile essentielle de cédrat est digne d'intérêt, et trouverait sans doute preneur si elle était offerte de façon régulière sur le marché.

Malheureusement, la désaffection dont le cédrat souffre en Corse l'oriente vers une disparition complète. Ceci non sans raisons. Le caractère non comestible du fruit, sinon sous forme de confiserie. Les difficultés d'extraction mécanique de l'huile essentielle dues au relief tourmenté de l'écorce du fruit. Le rendement en huile essentielle plutôt faible, lié à la grande taille des fruits. En effet, la teneur en huile essentielle est fonction de la surface du fruit et le rapport surface/poids diminue avec le poids. Enfin, la sensibilité au froid du cédratier en fait la victime des hivers rigoureux. Il ne se prête pas à des exploitations industrielles.

Les recherches menées par la Station Expérimentale de San Giuliano ont permis de caractériser des porte-greffes améliorant la résistance au froid et la résistance à la gommose : Citrus volkameriana et Citrus macrophylla. Espérons que ces améliorations techniques donneront une impulsion nouvelle à la culture du cédrat de Corse, pour lequel il existe toujours une demande dans la confiserie de haute qualité.

 

LE CÉDRAT DE CORSE : SUR LE CHEMIN DU RENOUVEAU

Addendum (2019) de Marc Antoine ROCCHESANI

 

Depuis mon enfance heureuse dans les champs d'agrumes de la côte orientale de la Corse jusqu'à mes cheveux blancs d'aujourd'hui, j'ai toujours été fasciné par ce fruit merveilleux (et mystérieux pour beaucoup...) qu'est le cédrat de Corse, qui sauva ma famille de la misère à l'époque où l'île était le premier producteur mondial de cédrats.

Dans le chapitre précédent, selon l'analyse de la situation en 1986, les auteurs délivrent à la fois un message pessimiste ("Malheureusement, la désaffection dont le cédrat souffre en Corse l'oriente vers une disparition complète") et une lueur d'espoir ("Espérons que ces améliorations techniques donneront une impulsion nouvelle à la culture du cédrat de Corse"). Plus de trente ans après, j'incline pour la lueur d'espoir qui pourrait devenir flambeau car le cédrat de Corse me semble être sur le chemin du renouveau.

Certes, dans les villages corses il semble que "pour avoir le cédrat heureux, il faut avoir le cédrat caché". Les petites parcelles plantées de cédratiers ne sont pas rares, et les antiques traditions culturales de cet agrume particulier se transmettent de générations en générations dans un silence qui peut paraître étonnant au non initié. Mais, au-delà de ce monde caché, quelques initiatives audacieuses et inédites mettent en lumière que le potentiel économique du cédrat de Corse existe toujours, alors que d'autres cultures d'agrumes de l'île connaissent malheureusement d'importantes difficultés.

A l'origine de ces initiatives, se trouvent des hommes et des femmes profondément attachés à leur culture corse, à laquelle le cédrat est consubstantiel, et résolument de plain-pied dans leur époque, soucieux du développement économique de leur île. Xavier CALIZI, producteur et transformateur de cédrats dans le village de Barrettali, sur la côte ouest du Cap Corse, en est une des figures emblématiques. J'ai été particulièrement heureux d'observer au fil des années comment il a perpétué la tradition de la culture du cédrat corse tout en réinventant une filière de valorisation spécifique.

C'est sous le nom Les Cédrats du Cap Corse que Xavier CALIZI a développé des plantations de cédratiers de la variété corse originelle, auxquelles il a adjoint une activité de transformation artisanale des fruits sur place. Plus récemment, en collaboration avec un chercheur en biopharmacie, il a lancé  une activité de fabrication de produits cosmétiques à partir d'un extrait de ses cédrats (gamme Cidralis, fabriquée exclusivement en France par un réseau d'experts indépendants).

La transformation des cédrats corses donne naissance à trois produits : le cédrat confit, la confiture et la liqueur. Ce sont des produits de tradition fabriqués de façon artisanale, mais j'ai remarqué qu'ils se caractérisent par la modernité d'un tour de main qui maîtrise la concentration du sucre et permet de ne pas inhiber l'arôme spécifique du fruit. Détails sur le site Les Cédrats du Cap Corse.
 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : produits issus de la transformation

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : produits issus de la transformation.
(liqueur de cédrat, cédrat confit, et confiture de cédrat).
Crédit : Marc Antoine ROCCHESANI.
 

La fabrication des produits cosmétiques à partir d'un extrait des fruits donne naissance à une large gamme qui illustre bien les potentialités de valorisation du cédrat corse : eau de parfum, sérum unique, gel douche, soin hydratant visage, soin hydratant visage et corps, etc. Détails sur le site Cidralis.
 

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : produits cosmétiques fabriqués à partir d'un extrait du fruit

Cédrat de Corse (Citrus medica 'Corsican') : produits cosmétiques fabriqués à partir d'un extrait du fruit.
Crédit : Marc Antoine ROCCHESANI.

 

En guise de conclusion, je ne puis qu'espérer que l'exemple de Xavier CALIZI inspire certains de nos jeunes compatriotes; et les encourage à prendre à leur tour le chemin du renouveau du cédrat corse...

 

 

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