Les fruitiers rares
 
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Article publié en 2004.
Première publication : 1950.
Auteur : V.-A. EVREINOFF.

 

 

Manzanilla

 

Crataegus mexicana Moçino et Sessé

 

 

 

V. -A. EVREINOFF, professeur à l'Institut Agricole de Toulouse et directeur scientifique de la Station d'Arboriculture de La Flambelle, a publié l'article en 1950 dans la revue Fruits d'Outre-Mer, vol.5, n° 7, pages 241 à 243. Il s'agit d'une présentation très intéressante de cet arbuste à mi-chemin entre les fruitiers sauvages et les fruitiers cultivés. Les cinq figures ont été tirées par l'auteur de Arboretum et Fruticetum Britannicum, par J.C. London, F. L. et H. S., etc. vol. VI, Londres, 1838.

 

 

Crataegus mexicana Moç. et Sessé (synonymes C. stipulosa Sted., C. hypolesia Koch, C. Guatemalensis Fr.) est encore peu connue en dehors de son aire de répartition spontanée, et mérite plus d'attention de la part des arboriculteurs des régions australes et subtropicales. Son nom courant dans les pays de langue espagnole est "Manzanilla", dérivé de "Manzana" et qui signifie "petite pomme". Dans son pays d'origine, le Mexique, cette espèce porte le nom local de "Tejocote" ou  "Texocotle", qui veut dire "prune à noyau" ou "prune de pierre".
 

Crataegus mexicana

Crataegus mexicana Moçino et Sessé.
 

A l'état spontané, le Crataegus mexicana est répandu au Mexique et au Guatemala, principalement au Mexique, aux altitudes de 1000 à 3000 mètres du Plateau Central, où on le rencontre parfois, non seulement en pieds isolés, mais aussi en petits bosquets clairsemés. En culture, cette espèce est répandue sur presque tout le territoire du Mexique, ainsi qu'au Guatemala et dans le Honduras. En Californie méridionale et dans l'Arizona, elle fut introduite il n'y a pas longtemps par F. Franceschi, sous le nom de Crataegus Guatemalensis ou Azérolier du Guatemala, surtout très intéressant comme porte-greffe de certains arbres fruitiers.

Elle présente une grande ressemblance avec nos azéroliers, et doit être envisagée comme très précieuse et très intéressante pour l'arboriculture. Son introduction et son acclimatation doivent être tentées dans toute l'Union Française et dans de nombreuses régions de la France métropolitaine, car, en plus des ses qualités particulières, le Crataegus mexicana ou "Manzanilla" est rustique, même dans les contrées où l'hiver est assez rigoureux.

C'est un arbre de 5-6 et même 8 mètres de hauteur, qui s'accommode facilement de tous les terrains, même secs et caillouteux. Cependant, sa végétation est véritablement surprenante, en vigueur et rendement, dans les terrains profonds où il n'est pas rare d'obtenir en 3-4 ans des arbres de toute beauté.
 

 Crataegus mexicana : rameau fleuri

Crataegus mexicana Moçino et Sessé : rameau fleuri.
(noter les feuilles non lobées, contrairement à Crataegus azarolus).

 

Crataegus mexicana : fleur

Crataegus mexicana Moçino et Sessé : fleur.
 

Comme la Manzanilla est cultivée depuis des siècles au Mexique, il en existe de nombreuses variétés, dont le volume des fruits varie de la grosseur d'une noix  jusqu'à celle d'une grosse prune, et même un peu plus. D'après le professeur Juan Balmé, directeur du Jardin des Plantes de la Ville de Mexico, il existe trois groupes de variétés qu'il désigne comme suit : à petits fruits arrondis ou légèrement allongés, de couleur jaune clair ou jaune orangé foncé, ou même rougeâtre ; à fruits moyens arrondis ou allongés des mêmes couleurs ; à gros fruits sphériques, aplatis ou légèrement allongés, de couleur jaune lavé de rouge vif ou complètement lavé de rouge, de belle apparence. Les variétés de ce dernier groupe sont cultivées de préférence et sont très répandues dans les jardins indigènes.
 

Crataegus mexicana : rameau avec fruits

Crataegus mexicana Moçino et Sessé : rameau avec fruits.
(noter les feuilles non lobées, contrairement à Crataegus azarolus).

 

Crataegus mexicana : fruit

 Crataegus mexicana Moçino et Sessé : fruit.
 

Le rendement est très abondant. La chair de la Manzanilla est très ferme, même dure (d'où son nom "prune de pierre" ou  "stone-plum" des Américains), mais sucrée, de saveur agréable et très parfumée. Les fruits sont généralement consommés à l'état frais, pendant l'automne et une grande partie de l'hiver, surtout pendant les fêtes de Noël car il est traditionnel de manger des Manzanillas à cette occasion.

L'époque de maturité varie selon les variétés et l'altitude à laquelle les fruits sont récoltés. Dans les plaines, les fruits mûrissent à partir du mois d'août, tandis que dans les régions de haute altitude certaines variétés n'arrivent à maturité qu'en novembre, et même décembre. Les époques de récolte échelonnées permettent d'alimenter les marchés pendant environ six mois. Les fruits supportent bien le transport, et se conservent bien. La multiplication se fait par semis (très sûr) et par greffe.

L'importance de la Manzanilla ne se borne pas à un grand rendement de très bons fruits. En effet, cette espèce présente beaucoup d'affinité avec les genres Malus, Pirus et Cydonia. Elle est de ce fait d'un intérêt remarquable comme porte-greffe aussi bien pour le pommier que pour le poirier et le cognassier, surtout dans les régions où les porte-greffes courants de ces espèces ne réussissent pas bien en raison des conditions spécifiques du climat ou du sol. M. Juan Balmé mentionne le fait exceptionnel suivant, qu'il a eu l'occasion d'observer dans un jardin des environs de la ville de Mexico, à 2000 mètres d'altitude : un grand arbre de Texocotle, greffé sur des nouvelles branches à 3 mètres de hauteur avec des variétés de pommier, poirier et cognassier, dans des conditions parfaites et en pleine fructification... Les résultats obtenus sur le même arbre sont plutôt surprenants et démontrent avec évidence à quel point son affinité est complète pour ces trois genres.

Ces qualités de porte-greffe du Crataegus mexicana ont été aussi découvertes il y a plusieurs siècles par les Pères Jésuites, qui les ont employées avec succès dans leurs plantations fruitières. Il est fort étonnant que ces qualités d'affinité aient été inconnues et négligées par les pomologues européens. La Manzanilla est donc non seulement un arbre fruitier d'une grande valeur, pour altitude élevée, terrain sec et régions arides, mais encore un précieux porte-greffe. Surtout pour le poirier, dans des terrains secs et caillouteux ou en altitude (plus de 1500 mètres), où le porte-greffe courant, le cognassier, ne réussit pas ; il en est de même pour le cognassier, sans parler du pommier. Grâce à ce porte-greffe, la culture de ces espèces peut et doit prendre une plus grande extension dans les régions où les conditions de climat, de sol et d'altitude sont jusqu'à présent des obstacles insurmontables.

La qualité des fruits de la Manzanilla lui donne une place stable dans les plantations fruitières, aussi bien de la France métropolitaine que d'Outre-Mer. Nous ne pouvons pas négliger cette précieuse espèce fruitière, jusqu'à présent presque inconnue des arboriculteurs français. Pour terminer, je dois dire qu'en dehors de l'Amérique Centrale, de la Californie méridionale, de l'Arizona, et de quelques contrées d'Amérique du Sud, la Manzanilla n'est pas connue et n'est pas cultivée, bien qu'elle ait, grâce à ses qualités particulières, toutes les possibilités de prendre une place importante dans l'arboriculture fruitière.

 

Voir article complémentaire de François Drouet relatant quelques observations de culture.

 

 

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